
Télémédecine : l’histoire de la consultation à distance
La téléconsultation, des origines jusqu’à présent : une (r)évolution des usages médicaux
Avec la crise sanitaire, le recours à la téléconsultation a explosé. En France, trois médecins généralistes sur quatre ont mis en place la consultation à distance depuis le début de l’épidémie (DREES), dans un cadre réglementaire toujours plus protecteur. Or si le développement des technologies de l’information et de la communication a largement contribué à démocratiser la consultation dématérialisée, celle-ci est pourtant loin d’être une pratique récente : les premières initiatives de transmission d’informations de santé à distance remontent aux années 1920, soit plus d’un siècle en arrière ! Nous vous proposons de plonger dans l’histoire de la télémédecine et de découvrir les fondations d’une pratique aujourd’hui 100 % fiable, sécurisée et extrêmement efficace.
Qu’est-ce que la téléconsultation ?
La téléconsultation est l’une des composantes de la télémédecine, qui elle-même désigne « les actes médicaux, réalisés à distance, au moyen d’un dispositif utilisant les technologies de l’information et de la communication » (article R6316-1 du Code de la santé publique). Elle englobe donc, aussi, la télé-expertise, la téléassistance et la télésurveillance médicale.
En tant que telle, la téléconsultation consiste en une consultation médicale réalisée à distance, grâce aux outils digitaux, entre un médecin et son patient, le plus souvent par le biais d’une application de visioconférence. Elle peut être réalisée depuis le domicile du patient, qui utilise une application sécurisée sur son ordinateur, son téléphone ou sa tablette, ou depuis un lieu dédié équipé d’une solution de visio-transmission, par exemple une pharmacie ou une maison de santé. Cette pratique permet une prise en charge du patient, voire un suivi médical, sans qu’il y ait de rencontre physique.
La télémédecine en général, et la téléconsultation en particulier, constituent des enjeux majeurs pour améliorer l’organisation du système de santé et garantir l’accès aux soins pour tous les patients, dans toutes les circonstances, sur l’ensemble du territoire. Elle permet d’obtenir un rendez-vous plus rapidement et d’assurer une prise en charge immédiate, d’être orienté vers un spécialiste ou de se faire prescrire un traitement tout en évitant des déplacements inutiles.
Dynamisée par l’essor d’Internet, la téléconsultation n’est toutefois pas un concept entièrement nouveau. Les moyens techniques en ont amélioré la pratique, mais, dans les faits, le recours aux communications à distance pour des besoins médicaux existe depuis plus d’un siècle – comme nous allons le voir tout de suite.
Un siècle de télémédecine : de la téléassistance médicale à la démocratisation de la consultation en ligne

1ère époque : l’assistance par téléphone pour les navires
Aux origines, la télémédecine s’appuie sur la téléphonie. Au début des années 1920, aux États-Unis, se met en place un service de téléassistance par téléphone pour répondre à un défi majeur : garantir une assistance médicale de bonne qualité à bord des bateaux. Le 18 novembre 1920, la première licence pour radio de service médical aux navires est enregistrée à New York. Dans la foulée, plusieurs pays maritimes développent ce type de service pour leurs propres flottes, principalement en Europe.
Le grand public se prend alors à imaginer le futur de la téléconsultation. En avril 1924, la revue américaine Radio News publie en couverture un photomontage montrant un « radiodocteur » relié à son patient par un appareil qui diffuse l’image et le son (voir ci-dessous). Cette vue d’artiste témoigne de la vivacité d’un imaginaire qui embrasse pleinement le principe de la consultation à distance… lorsque la technologie le permettra !
2e époque : la transmission d’images de radiologie
À partir des années 1950, le monde médical s’intéresse à la transmission à distance, par le biais du téléphone, d’images de radiologie : c’est l’époque de la première utilisation du terme « télémédecine » dans la littérature. Après un premier essai concluant en 1948, des radiologues canadiens conçoivent un système de téléradiologie fonctionnel au milieu de la décennie. Aux États-Unis, la communication vidéo dans un cadre médical prend forme en 1959, lorsque des cliniciens du Nebraska parviennent à transmettre, par la télévision, des examens neurologiques à leurs étudiants sur le même campus, puis mettent en place (en 1964) un réseau de télémédecine avec un hôpital situé à 150 kilomètres de là.
Dans les années 60 et 70, de nombreuses applications de télémédecine sont initiées (ou développées) par des organismes gouvernementaux américains, notamment le ministère de la Santé et la NASA (qui élabore des technologies en vue de la surveillance médicale des astronautes et de la délivrance de soins depuis la Terre jusque dans l’espace). En France, au même moment – c’est-à-dire en 1964 – le docteur Louis Lareng, fondateur du Samu, met en place, dans la région de Midi-Pyrénées, un parcours de soins maîtrisé bâti sur la pratique de la téléconsultation et de la téléexpertise.
3e époque : la révolution du web et le cadre réglementaire
En 1973, le tout premier Congrès international de télémédecine, qui se tient à Chicago, fait un constat d’échec : les techniques de communication sont jugées insuffisantes pour garantir une prise en charge de qualité via la téléconsultation. Il faut attendre la fin du XXe siècle et le développement rapide d’Internet pour que la technologie permette de matérialiser les attentes relatives à la télémédecine. Une pratique que l’Organisation mondiale de la santé entérine de fait en 1997 en la définissant comme « l’incorporation des systèmes de communication à l’intérieur d’une médecine curative », avant d’établir un premier cadre réglementaire international en 2005.
De fait, l’essor véritable de la médecine à distance est rendu possible grâce au web, qui marque les débuts de la téléconsultation moderne. Cette évolution rapide nécessite la mise en place de limites juridiques claires, seules capables d’encadrer les pratiques et de sécuriser le recours aux applications digitales dans un contexte médical. En France, la télémédecine est réglementée dès 2009 avec la loi Hôpital, Patient, Santé et Territoire du 21 juillet (et son décret d’application datant d’octobre 2010), qui reconnaît l’existence de cinq actes : la téléconsultation, la télé-expertise, la télésurveillance, la téléassistance et la réponse médicale.
Enfin, le 15 septembre 2018, la téléconsultation fait son entrée dans le droit commun, et les cinq actes caractérisés par le texte de 2009 sont pris en charge par l’Assurance Maladie, en accord avec les mutuelles et les syndicats de médecins – une étape fondamentale qui garantit l’accès aux soins à distance à tous et toutes. Ce qui fait de 2018 l’année de la démocratisation de cette pratique dans l’Hexagone, alors qu’elle est déjà très largement répandue aux États-Unis et dans les pays scandinaves…
La démocratisation de la télémédecine, rendue possible grâce au développement technologique autant qu’à la mise en place d’un cadre légal, permet de garantir aux Français l’accès à des soins de qualité où qu’ils soient, et quelles que soient les circonstances. C’est l’aboutissement d’une ambition vieille d’un siècle : transformer la vision imaginaire du « radiodocteur » en une réalité concrète… Mais une réalité qui se veut à la fois fiable, efficace et pleinement sécurisée.
Sources :
- https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK45445/
- https://beesens.com/contents/84979
- https://www.telemedaction.org/444040624
- https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2011-06/cadrage_telemedecine_vf.pdf